Questions sur la dette grecque, par Pierre Khalfa

La dette a servi de prétexte dans tous les pays européens pour mener des politiques d’austérité drastiques qui ont amené l’Europe au bord de la déflation et qui ont eu des conséquences sociales dramatiques. La dette grecque est aujourd’hui au cœur de l’affrontement entre le nouveau gouvernement du pays et les institutions européennes.

1) D’ou vient-elle ?

Quadruplant pendant la dictature des colonels entre 1967 et 1974, elle a continué à croître par la suite à cause de l’importance des dépenses militaires (4% du PIB, contre 2,4% en France) dont les entreprises européennes d’armement ont été les grandes bénéficiaires, des dépenses somptuaires, pour la plupart inutiles, des jeux olympiques de 2004, de la corruption généralisée des classes dirigeantes et de l’impossibilité de faire payer l’impôt aux plus riches, parmi lesquels l’Église orthodoxe et les armateurs.

La croissance de la dette depuis la crise est le produit de l’effet combiné des cures d’austérité, qui ont plongé le pays dans la dépression, et de la spéculation financière qui fait exploser les taux d’intérêt. En 2009, avant même l’éclatement de la crise de la dette grecque, les banques se refinançaient auprès de la Banque centrale européenne (BCE) au taux de 1 % et prêtaient à la Grèce à 6 %, ce taux passant même à 12 % début 2010. Salué par la plupart des commentateurs, le retour de la Grèce sur les marchés financiers en avril 2014 s’est traduit par un emprunt à un taux de 4,75 % alors que le taux de refinancement des banques était de 0,25 %. Conséquence : la dette est passée de 113 % du PIB en 2009 à 174 % aujourd’hui et se monte à 319 milliards d’euros et ce, malgré une timide restructuration en mars 2012.

2) Que penser de la première restructuration de la dette grecque ?

Une restructuration d’une dette consiste à en réduire le montant et/ou à en étaler le remboursement. A partir d’avril 2010, la Grèce est soumise à des attaques spéculatives de la part des marchés financiers. Les taux d’intérêt explosent et le pays est au bord de la faillite ne pouvant plus emprunter pour refinancer sa dette. L’Union européenne impose des plans d’austérité massifs et met le pays sous la tutelle de la Troïka composée de représentants du Fonds monétaire international (FMI), de la Banque centrale européenne (BCE) et de la Commission européenne. De nouveaux crédits sont accordés à la Grèce pour qu’elle rembourse ses créanciers. Mais l’activité économique s’effondre et la dette continue de croître pour atteindre 160 % du PIB en 2012.

Devant cette situation, la Troïka accepte en mars 2012 une restructuration de la dette grecque qui prend la forme d’un échange des anciennes obligations contre des nouvelles obligations de valeur plus faible et de durée plus longue. Elle concerne les créanciers privés (banques, compagnies d’assurances, fonds d’investissement). Le montant de la dette grecque concerné par cet échange atteint 206 milliards d'euros (sur une dette publique globale de plus de 360 milliards). Les anciennes obligations grecques sont échangées contre des obligations émises par le Fonds européen de stabilité financière[1] (FESF) et contre de nouvelles obligations grecques de maturité plus longue. Au total, les créanciers privés vont perdre jusqu'à 107 des 206 milliards d'euros de dette grecque qu'ils détenaient.

En fait, cette perte est toute théorique car en mars 2012, la valeur des obligations grecques sur le marché secondaire était quasi nulle car la Grèce était dans l’incapacité de les rembourser. Les banques et autres compagnies d’assurance et fonds d’investissement ont donc échangé des titres qui ne valaient plus rien contre des titres dont une partie est garantie par le FESF et dont l’autre aurait beaucoup plus de chances d’être remboursée par l’État grec. Une plutôt bonne affaire donc.

L'objectif de cette restructuration était de rédu

via blogs.mediapart.fr

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