Pas PLus Belle La Vie : quand une victime d’un kidnapping, une séquestration longue (à la Natascha Kampusch) et d’un harcèlement par son kidnappeur est présentée comme une complice de celui-ci

Cette note a été écrite par une personne qui suit et connaît la série et pas par l’auteur de ce blog. En cas de commentaire(s), il faudra attendre que la personne qui a rédigé cette note décide de répondre pour qu’un commentaire en réponse soit publié, ce qui pourra prendre du temps.

La série Plus Belle La Vie est bien connue en France. Diffusée par France3 depuis des années, elle a connu des taux d’audience très élevés, avant que ceux-ci ne diminuent. France Télévisions a annoncé son arrêt, après près de deux décennies (début en 2004). Pour leurs épisodes, d’une durée de 25 minutes environ, les histoires s’appuient souvent sur des faits sociaux ou des polémiques françaises, en plus d’une structuration constante, autour de crimes, délits, pour lesquels il y a toujours une résolution. Elle est située à Marseille, dans le quartier dit du « Mistral » (une copie d’un quartier populaire/bobo avec des éléments « typiques »). Ces dernières années, un personnage est apparu avec une jeune lycéenne, Emma, interprétée par Pauline Bression (l’actrice a un physique suggérant un âge de 10 ans de moins). Un jour, elle a paru souffrir d’un mal moral, lié à son passé. Le récit a révélé qu’elle avait eu une soeur, plus jeune, qui avait disparu, kidnappée par un homme qui, depuis, la retenait contre sa volonté, dans une maison (à Marseille). Cette disparition finit par devenir obsessionnelle pour Emma, laquelle obtient que la police reprenne cette affaire, pour retrouver sa soeur, et c’est ce qui arrive. Camille, après avoir été retenue prisonnière pendant près de 10 ans, est libérée. Emma prend sa soeur sous son aile. Camille souffre de « tocs », de maux. Elle a été retenue prisonnière par un kidnappeur, qui est aussi un tueur. Il a fait d’elle ce qui voulait pendant des années. Il lui a imposé des sentiments. Camille est une jeune femme très fragile. Bien qu’elle ait subie des violences psychologiques et physiques, elle ne fait l’objet d’aucun suivi après sa libération (à part pendant les premiers jours). Hélas pour elle, son kidnappeur a réussi à échapper à la police (décrite dans la série comme inconsciente et incompétente)* et il revient vers elle, s’impose à elle à nouveau. « Logiquement », elle devrait le dénoncer, mais il lui a imposé à se soumettre pendant des années, et, même « libérée », elle ne l’est pas de cette emprise. C’est un phénomène psychologique banal, attesté par de nombreux exemples, observations. Il se rapproche d’elle en devenant agent d’accueil dans un hôtel du Mistral. Il la surveille tout le temps, la harcèle pour un oui ou pour un non. Il est jaloux de toute personne qui sympathise avec Camille. Il la met en garde constamment contre des dangers ou contre tel ou tel. Et il finit par prendre prétexte de diverses actions d’un personnage pour le tuer, en associant Camille d’une manière ou d’une autre aux crimes, contre lesquels elle ne peut rien, qu’elle ne peut empêcher, puisqu’elle ne peut pas le dénoncer (elle est terrorisée intérieurement par lui). Dans une telle situation, elle finit par intégrer le comportement de son kidnappeur : surveiller les autres, veiller sur certains, en protéger certains et en écarter d’autres. Elle finit par devenir comme lui, manipulatrice. Amoureuse d’un des personnages récurrents de la série, lequel, pour commencer, rejette son amour, elle invente un stratagème pour l’amener à ce sentiment envers elle, grâce à l’aide de son kidnappeur. Elle vit alors une période heureuse, presque euphorique, d’autant que son kidnappeur finit par être arrêté. Celui-ci ne la trahit pas, et assume tout, en affirmant qu’elle ignorait ce qu’il faisait. Mais sa soeur, Emma, et son propre petit copain, finissent par avoir des doutes. Ces épisodes ont été diffusés ces derniers jours (fin juillet/août 2022). Ils tendent un piège à Camille, et celle-ci tombe dedans. Elle finit par leur révéler toute l’histoire, qui était connue des téléspectateurs. Sa soeur la traite comme un monstre, son petit copain (agent des FDO) renie ses sentiments, et la police l’arrête. Après une garde à vue, elle est placée dans une « unité pour malades difficiles ».

Pourquoi parler de cette « histoire », fictive, à priori sans importance (parce que fictive) ? Elle traduit une méconnaissance des affres psychologiques subis par une victime d’un kidnapping, une séquestration, des violences et un harcèlement constant par le kidnappeur. Après sa libération, Camille est abandonnée dans la « nature », sans accompagnement constant et sérieux, et c’est délirant. Sa soeur et ses amis n’intègrent pas ce que ses années perdues, quand elle était prisonnière, ont pu être, ne cherchent pas à connaître et comprendre les effets de cette situation sur elle. Pendant un temps, ils ne savent pas que le kidnappeur est encore là. Mais quand ils l’apprennent, avec son arrestation, ils ne se posent aucune question sur ce qui a pu imposer à Camille de « protéger » son kidnappeur. Là encore, ils l’abandonnent, de fait. Elle tente de se reconstruire, avec une vie normale, amoureuse, toujours marquée par ces violences. Quand elle est à son tour arrêtée pour sa complicité avec des crimes de son kidnappeur, personne ne lui dit clairement qu’elle a été, qu’elle EST une victime. La structure du récit PBLV est que « la vérité finisse par se révéler ». Et c’est aussi le cas ici. Mais la vérité concernant Camille, le fait qu’elle a été, qu’elle EST une victime, ne l’est pas. Elle est avant tout présentée comme une complice, criminelle, de. Alors que toute personne qui aurait vécu, subi, ce qu’elle a vécu, aurait fait les mêmes choses qu’elle. Et la voilà à nouveau enfermée, après l’avoir été pendant des années de sa jeunesse. De sa vraie famille, elle le dit avant qu’elle soit transportée par son UMD : on ne laisse pas une enfant faire du vélo sans surveillance. Sa famille l’a abandonnée, une première fois, puis d’autres fois. Et quand Emma apprend la vérité, laquelle comprend le fait que son kidnappeur, Jacob, a tué leur mère, parce que celle-ci voulait faire venir Camille avec elle loin d’Emma, elle la dénonce immédiatement à la police, sans chercher à comprendre ce qui s’est passé. SI on vient dire que PBLV n’est que PBLV, je réponds qu’il y a déjà un grand nombre de téléspectateurs et que les rediffusions dans les décennies qui viennent en feront de nouveaux. A ceux-ci, cette note a un seul message : quand une personne est une victime de telles violences, svp, cherchez à la comprendre, vraiment, et à l’aider, et pas à faire semblant.

* s’agit-il d’une description honnête ou exagérément critique ?

5 1 vote
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x