De notre envoyé spécial à Bruxelles. Des associations de victimes du franquisme et leurs alliés argentins ont fait le déplacement à Bruxelles début mars, pour exhorter l'Union européenne à prendre position dans les débats mémoriels qui continuent de secouer l'Espagne, bientôt 40 ans après la mort de Franco. À Madrid, le gouvernement conservateur de Mariano Rajoy se refuse à rouvrir le dossier, dans un pays où le socle de la « transition » (1976-1982) se fissure de toutes parts sous l'effet de la crise.
L'Argentine est l'unique pays au monde où s'instruit le procès des crimes du franquisme, la justice de Buenos Aires s'étant appuyée sur le concept de « justice universelle » pour lancer, en 2010, une première enquête. Selon ce principe, les crimes contre l'humanité, par nature imprescriptibles, peuvent être poursuivis en dehors des frontières où ils ont été commis. En octobre 2014, la juge chargée du dossier a lancé un mandat d'arrêt international à l'encontre d'une vingtaine d'ex-responsables du régime, dont deux anciens ministres. Mais Madrid n'a jusqu'à présent pas donné son feu vert à ces extraditions. Entre-temps, plusieurs des personnes inculpées sont décédées. Certaines sont accusées de génocide.
« Nous demandons que le parlement européen, et la commission européenne, exigent du gouvernement espagnol qu'il lève les obstacles qui empêchent d'enquêter sur les crimes du franquisme, pour que soient identifiés les corps gisant dans les fosses communes, et pour que l'on en finisse avec l'apologie du franquisme sur les monuments et les places d'Espagne », a déclaré Carlos Slepoy, avocat de la Plateforme de soutien à la plainte argentine contre les crimes franquistes (CeAQUA), lors d'une conférence de presse à Bruxelles le 4 mars.
« Nous cherchons, en venant ici, une condamnation du gouvernement espagnol », a renchéri José Maria Galante, porte-parole de l'association d'ex-prisonniers du franquisme, La Comuna, qui soutient le processus engagé à Buenos Aires. « Ce gouvernement, et ceux qui l'ont précédé, sont complices de la barbarie franquiste. Nous, les victimes, avons été contraints d'aller demander justice en dehors de nos frontières (….) Ces complices du franquisme se sentent aujourd'hui autorisés à passer outre les textes de loi internationaux, en bloquant l'extradition de ceux qui ont signé les condamnations à mort de nos camarades », a-t-il poursuivi.
via www.mediapart.fr