Les Kurdes de Turquie sous la foudre d’Erdogan | L’Humanité

Diyarbakir (Kurdistan de Turquie), envoyé spécial.   L’une après l’autre, les villes du sud-est de la Turquie, le Kurdistan, déclarent leur indépendance. Une indépendance formelle qui vise, de façon pacifique, à résister à la violence de l’État et s’apparente plus à de la désobéissance civile. Depuis la fin du mois de juillet, celui-ci a lancé ses troupes contre le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK). Un prétexte pour renouer avec des pratiques qu’on pensait révolues : incursion dans les quartiers ou les villages, destruction de biens, passages à tabac, arrestations, emprisonnement et assassinats. Un tribunal turc a décidé dimanche d’incarcérer cinq maires de ces villes, accusés d’avoir essayé de « détruire l’unité » nationale en appelant à l’autonomie de la région. Les maires détenus ont tous été élus sous l’étiquette du Parti démocratique des régions (DBP). Parmi ces élus, Fatma Barut, 
co-maire du district de Sur, à Diyarbakir, que nous avions rencontrée quelques jours auparavant.

Le quartier est en ébullition. Depuis des semaines et des semaines. Fatma Barut était dans le collimateur des autorités centrales. Pas seulement parce qu’elle appartient au DBP et qu’elle a fait campagne pour le HDP (Parti démocratique des peuples), empêchant ainsi le parti du président turc, Recep Tayyip Erdogan, d’obtenir la majorité absolue. Non ! Fatma Barut est au plus près de ses administrés qu’elle défend sans compter. Ainsi, ce jour-là, alors qu’elle accompagne la décision prise par les habitants de se « séparer » du pouvoir central et qu’en dehors du quartier la police et leurs forces spéciales s’apprêtent à mener l’assaut, elle explique calmement à l’Humanité : « Depuis quelque temps, la police essaie d’entrer. Sa présence n’est pas acceptée par la population. Ici, le problème principal est la drogue et la prostitution. Des fléaux encouragés et même soutenus par la police. C’est pourquoi les habitants ont monté des barricades et décrété leur autogestion. Si la police considère notre sécurité de cette manière, nous n’avons pas besoin d’elle. »

Quelques jours plus tard, Fatma Barut a été arrêtée, de même que le comaire Seyid Narin. La maire de la ville de Silvan (région de Diyarbakir), Yüksel Bodakci, est également détenue. Dans le même temps, à l’extrême sud-est du pays, dans la région d’Hakkari (frontalière avec l’Irak et l’Iran), les co-maires de la ville, Dilek Hatipoglu et Nurullah Ciftci, ont été mis en détention, ainsi que le responsable local du HDP, Ismail Sihat Kaya. Ils vont être jugés dans le cadre de l’infraction à l’article 302 de la Constitution (crime contre le territoire et la souveraineté de l’État). Une peine d’emprisonnement à perpétuité a déjà été demandée par le procureur. Ils ont rejoint les milliers de prisonniers qui croupissent dans les geôles turques et qui ont lancé, il y a une dizaine de jours, une grève de la faim.

« Des pressions sont exercées 
sur les prisonniers »

via www.humanite.fr

0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x