C’est une information microscopique qui n’a aucun intérêt par elle-même : Alain Minc a reçu samedi le prix du Livre politique 2016. Mais c’est une information qui en cache une autre, beaucoup plus importante : elle vient confirmer que le journalisme de connivence à la française tient encore le haut du pavé, puisque c’est une belle brochette d’éditorialistes des grands médias français qui a eu la stupéfiante idée de récompenser un essayiste qui, dans le passé, a déjà été condamné pour plagiat.

Un jury de journalistes a attribué samedi le prix du Livre politique à Alain Minc pour son livre Un Français de tant de souches (Grasset). Le jury a préféré ce livre à deux autres, qui étaient retenus dans la phase finale du vote : une enquête sur Patrick Buisson, Le Mauvais Génie (Fayard), par deux journalistes du Monde, Ariane Chemin et Vanessa Schneider ; et le livre Piège d’identité (Fayard), écrit par Gilles Finchelstein, un ancien collaborateur de Dominique Strauss-Kahn, proche du banquier d’affaires Matthieu Pigasse auquel il a parfois prêté sa plume.
Membre du jury, l’éditorialiste du Journal du dimanche Dominique de Montvalon raconte dans ces termes sur le site Internet de la publication comment les choses se sont passées : « Après des explications de vote parfois passionnées, le livre de Minc a recueilli au 1er tour 9 voix et les autres livres, ex-æquo, 8 voix chacun. Au second tour, après de nouvelles explications de vote, l'essai d'Alain Minc a recueilli 10 voix, l'emportant donc, devançant Le Mauvais Génie d'une voix, le livre de Gilles Finchelstein n'en obtenant plus “que” 6. »
Ainsi, il s’est trouvé une majorité d’éditorialistes de ce qu’il est convenu d’appeler la grande presse pour voter en faveur de l’entremetteur du capitalisme parisien, ancien conseiller occulte de Nicolas Sarkozy reconverti aujourd’hui dans la campagne en faveur d’Alain Juppé, qui tout au long de sa carrière intellectuelle n’a cessé de se tromper.
N’a-t-il pas annoncé la balkanisation de l’Europe quelques semaines avant que le Mur ne s’effondre ? Le 5 janvier 2008, alors qu’une crise financière historique avait déjà commencé à secouer la planète, n’a-t-il pas proféré sur Direct 8 l’une de ces âneries dont il a le secret ? « On nous aurait dit que le système financier serait régulé avec un doigté tel qu’il évitera une crise, une crise qui aurait pu être de l’ampleur des très grandes crises financières du passé. C’est quand même un univers très résilient qui finalement, sans qu’il y ait d’organe apparent de régulation, est très bien régulé, quand même. Le jeu conjugué des banques et même des gouvernements, on se dit l’empirisme en réalité prévaut au-delà des postures idéologiques, et l’économie mondiale est plutôt bien gérée. » Mais il y a pire que la constance dans l’erreur, il y a le plagiat ! Comme je l’ai raconté dans mon livre sur Alain Minc, Petits Conseils (Stock, 2007), le 28 novembre 2001, le tribunal de grande instance de Paris a prononcé un jugement très sévère à l’encontre d’Alain Minc, estimant que