Brésil, Argentine, Venezuela, Cuba, Équateur… Dans chacun de ces pays, les gouvernements progressistes qui ont leur particularité doivent faire face à une profonde remise en question. Au bout d'une déc en n ie de conquêtes sociales et d'avancées progressistes, tous sont désormais confrontés à une remobilisation des droites locales, qui profitent des problèmes économiques. La Bolivie apparaît capable d'incarner la révolution bolivarienne. La présidence du « G77 + Chine » en 2014 et la venue du pape en juillet 2015 marquent la place prise par ce pays de 10 millions d'habitants sur la scène internationale. Le triomphe d'Evo Morales à la présidentielle de 2014 (61 % des voix) a consacré la réussite politique du dirigeant bolivien et de son parti (le Mouvement vers le socialisme, MAS).
Depuis son arrivée au pouvoir en 2006, le pays a entamé une profonde transformation. 10 ans auparavant, la Bolivie était considérée comme l'un des pays les plus pauvres de la région et l'un des plus corrompus. Pourtant, ce pays déborde de richesses minières (argent, or, étain, fer, cuivre, zinc, tungstène, manganèse) et énergétiques, avec d'importantes réserves de gaz naturel et de potassium et lithium. Au cours de cette décennie, en moyenne, la croissance économique de la Bolivie a connu un rythme annuel supérieur à 5 % (parmi les plus élevés d'Amérique latine) et une inflation modérée. « Le niveau de vie général a donc doublé. Les dépenses publiques, malgré les importants investissements sociaux, sont également contrôlées à tel point que la balance courante offre un résultat positif avec un excédent budgétaire de 2,6 % (en 2014). Si les exportations, principalement d'hydrocarbures et de produits miniers, jouent un rôle important dans cette prospérité économique, la demande intérieure (+ 5,4 %) constitue le principal moteur de la croissance. »
UN « ÉTAT PLURINATIONAL »
Plus d'un million de Boliviens (soit 10 % de la population) sont sortis de la pauvreté, le taux de chômage est de 3,2 %. Comment ? Le pouvoir bolivien a nationalisé les secteurs stratégiques générateurs d'excédents hydrocarbures, industrie minière et a investi dans les secteurs générateurs d'emploi : industrie, produits manufacturés, artisanat, transport, agriculture et élevage, logement, commerce. Selon l'universitaire Jean Ortiz, « depuis qu'il est au pouvoir, ce président a rejeté le modèle néolibéral et lui a substitué un modèle économique social communautaire productif. Un choix qui s'est accompagné d'une réduction de la pauvreté, grâce à des politiques sociales (enseignement, santé), des augmentations salariales (aux fonctionnaires et aux travailleurs du secteur public), des aides (bons Juancito Pinto, pension « dignité », bons Juana Azurduy) ». La nouvelle Constitution a établi pour la première fois un « État plurinational » et reconnaît les droits des différentes nations qui cohabitent sur le territoire bolivien.
Sur le site Internet Mémoire des luttes, Ignacio Ramonet constate : « Evo Morales prouve que la gauche au pouvoir peut être efficace ; qu'elle peut mener des politiques d'intégration et de redistribution de la richesse sans mettre en danger la stabilité de l'économie. » Comment ? « Evo Morales est parvenu à battre, idéologiquement, ses principaux adversaires regroupés au sein de la caste des entrepreneurs de la province de Santa Cruz, principal moteur économique du pays. Ce groupe conservateur, qui a tout tenté contre le président (sécession, coup d'État), a fini par se soumettre et se joindre au projet présidentiel. »
Seule interrogation, la Bolivie peutelle mener la lutte contre le néolibéralisme ? Car entre 1999 et 2008, Evo Morales a profité des nombreuses victoires électorales au Venezuela, au Brésil, en Argentine, en Uruguay, en Bolivie, au Honduras, en Équateur, au Nicaragua et au Paraguay. Aujourd'hui, cet élan est fortement contesté.
via www.humanite.fr