François Hollande aura décidément renié tous ses engagements de campagne, les uns après les autres, et se sera méthodiquement appliqué à désespérer ceux qui lui ont permis d’accéder à l’Élysée. S’il en faut une dernière illustration en date, c’est assurément le dossier hautement symbolique des retraites qui l’apporte. Comme il semble loin, en effet, le temps où le candidat aux primaires socialistes promettait d’abroger la principale mesure prise en 2010 par Nicolas Sarkozy, relevant de 60 à 62 ans l’âge légal du départ à la retraite ! Désormais, même si ce n’est pas affiché publiquement, c’est une autre voie qu’empruntent les dignitaires socialistes : en avant, à petits pas vers la retraite… à 67 ans ! Le Medef en rêve depuis longtemps, et c’est vers cela que la France se dirige.
Même si la plupart des grands médias se gardent de dire les choses aussi nettement, il n’est, de fait, guère difficile de décrypter les intentions du pouvoir. Car plusieurs indices laissent clairement entendre que c’est dans cette voie que le gouvernement veut aller, en emmenant avec lui les partenaires sociaux qui sont disposés à le suivre. Au diable la retraite à 60 ans, qui depuis 1982 faisait partie des réformes emblématiques de la gauche ! Au diable la retraite à 62 ans, à laquelle François Hollande s’était rallié, sans vraiment l’assumer ! Car en vérité, c'est à la retraite à 67 ans que la France se prépare, sans que cela ne soit vraiment affiché.
Ces dérapages successifs qui nous ont conduits presque insensiblement de la retraite à 60 ans – promis, juré, on ne renoncera jamais à cet acquis social majeur ! – jusqu'à la retraite à 67 ans qui se dessine, il n’est guère difficile de les reconstituer. D’abord, jusqu’en 2011, il y a donc, pour la gauche dans toutes ces composantes, un dogme absolu : la retraite à 60 ans fait partie des grandes conquêtes sociales qu’il faut défendre bec et ongles contre les réactionnaires de tous poils qui veulent l'abroger.
Candidat à la primaire socialiste, François Hollande dénonce – comme d’ailleurs tous ces rivaux, à la seule exception notable de… Manuel Valls ! – la réforme pilotée en 2010 par Nicolas Sarkozy et François Fillon, relevant à 62 ans l’âge légal du départ à la retraite. Lors de son face-à-face avec Martine Aubry, pour le second tour, le 12 octobre 2011, il prend ainsi clairement position pour le retour à la retraite à 60 ans :
Mais, ensuite, François Hollande fait du… Hollande ! Plus jamais, il ne dira les choses aussi clairement. À ceux qui sont attachés à la retraite à 60 ans, il promet qu’il honorera sa promesse, croix de bois, croix de fer ! À ceux qui y sont opposés, il suggère à demi-mot qu’il se reniera. Dans cet art du fildefériste dans lequel le dignitaire socialiste excelle, il réalise ainsi, le 2 mai 2012, une prouesse remarquable, lors de son face-à-face avec Nicolas Sarkozy, pendant l’entre-deux tours : en quelques phrases, il arrive à dire une chose et son contraire. « Enfin, sur la question des retraites, vous avez fait une réforme, qui d’ailleurs ne sera plus financée à partir de 2017-2018. Vous l’avez fait voter, elle a ses inconvénients et elle a ses lourdeurs, surtout ses injustices. La première des injustices est qu’une femme, un homme qui a commencé à travailler à 18 ans et qui va avoir ses 41 années de cotisations, à qui l’on va dire "mais non, ce n’est plus 60 ans, c’est maintenant 62 ans et donc il
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