Economie: échec, confusion et amateurisme – Page 2 | Mediapart

Le gouvernement a en effet adossé sa politique économique à deux priorités majeures, toutes les deux d’inspiration libérale. En premier lieu, il a fait de la lutte pour la réduction des déficits sa première priorité, avec à la clef le plan de 50 milliards d’euros d’économies que l’on connaît. Puis il a fait de son plan de plus de 40 milliards d’euros d’allègements fiscaux et sociaux sa seconde priorité. Et mariant les deux priorités, il a argué qu’il avait mis au point la bonne recette pour renouer avec la croissance. On connaît les arguments avancés : il n’y a pas de croissance durable sans rétablissement des comptes publics ; et il n’y a pas plus de croissance dynamique si la compétitivité des entreprises est grevée par des impôts trop lourds ou des cotisations sociales trop fortes.

Mais ces arguments, puisés dans la boîte à outils intellectuelle du patronat et des milieux d’affaires, sinon même de l’UMP, ont été réfutés par de nombreux experts – avant de l’être dans les rangs mêmes du Parti socialiste par les députés frondeurs – et pas seulement eux.

Dans le cas de l’austérité, un seul exemple : dès le 6 juillet 2012, l’économiste de l’OFCE Xavier Timbeau tire la sonnette d’alarme dans un entretien prémonitoire avec Mediapart (lire Xavier Timbeau (OFCE) : « C’est l’escalade vers la catastrophe »). Avec le recul, ce que dit cet expert prend une forte résonance. Car, quand il prend la parole, le 6 juillet 2012, la gauche socialiste n’est au pouvoir que depuis quelques semaines. Et le gouvernement de Jean-Marc Ayrault n’a fait que prendre de premières mesures budgétaires d’économie. À l’époque, on est encore très loin du plan d’austérité de 50 milliards.

Avec le recul, il est utile de relire ce que disait cet expert : il expliquait que dans une période de stagnation ou même de récession, il était aberrant de conduire une politique restrictive car cela conduirait à casser toute possibilité de reprise. Il expliquait qu’une politique qui chercherait en priorité à réduire les déficits publics à marche forcée dans cette période de conjoncture dépressive serait radicalement contre-productive : cassant la croissance, elle conduirait à tarir les rentrées de recettes fiscales et sociales. En clair, prévenait-il, c’est une politique qui « s’auto-annule ». « On est dans un processus à plusieurs étapes : dans un premier temps, on annonce un peu plus d'austérité ; et puis on dit : “Ah! c'est pas de chance ! Il y aura moins de croissance que prévu ; il faut donc que l'on soit un peu plus dur" ; et ainsi de suite…On est dans un processus où l'objectif s'éloigne au fur et à mesure que l'on cherche à s'en rapprocher. C'est la logique à l'œuvre au niveau français, comme elle l'est au niveau européen », expliquait Xavier Timbeau.

Cette critique, il n’était pas le seul à l’exprimer. Dès le printemps 2011, c’est même cela qui avait conduit le Parti socialiste à adopter une plate-forme pour la présidentielle, ratifiée par les militants, qui critiquait la décision de Nicolas Sarkozy de vouloir atteindre les 3 % de déficits publics dès 2013. Pour ne pas étouffer l’activité, le projet socialiste préconisait de réduire les déficits de manière beaucoup plus prudente, en repoussant l’objectif des 3 % à 2014 sinon même 2015. Mais on sait ce qu’il en est advenu : foulant au pied le projet de son propre parti, François Hollande a décidé de retenir l’objectif de Nicolas Sarkozy, avec une réduction à 3 % des déficits dès 2013.

Le résultat, on le voit aujourd’hui. Comme l’avait prédit Xavier Timbeau, c’est une politique qui « s’auto-annule » que les socialistes ont mise en place. Fixant le cap sur l’austérité au nom de la réduction des défici

via www.mediapart.fr

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