Ecomouv: les calculs de la haute administration – Page 1 | Mediapart

Depuis des mois, il était l’homme invisible. Le directeur général des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM), Daniel Bursaux, est pourtant un personnage clé de l’écotaxe. C’est lui qui a signé par délégation ministérielle le contrat avec le consortium Ecomouv en septembre 2011. En fonction depuis 2008, il a conduit tout le processus de la taxe poids lourds depuis son origine. Sans compter qu’il a été auparavant directeur des services régionaux de l’Alsace – la région qui a porté le projet de l’écotaxe depuis 2006 – avant de devenir directeur adjoint de cabinet de Dominique Perben, ministre des transports puis président de l’agence de financement des infrastructures de transports (AFITF), l’organisme qui doit récolter le produit de l’écotaxe et la redistribuer en fonction des travaux.

© senat

Son audition était donc très attendue, mardi 11 février, par la commission d’enquête sénatoriale sur le contrat Ecomouv. Après avoir auditionné divers interlocuteurs, parfois très éloignés du dossier et se noyant dans des considérations générales, ou certains n’ayant que des visions parcellaires ou en disant le moins possible, la commission avait enfin devant elle un témoin de première main.

Sans doute informé de l’énervement de certains des membres de la commission de voir les responsables de l’administration se dérober devant les questions, Daniel Bursaux prit soin d’emblée de dire qu’il n’esquiverait pas. Prenant à l’appui un texte du vice-président du Conseil d’État, il expliqua que le rôle des hauts fonctionnaires était aussi d’assumer leurs responsabilités, de prendre des risques. Il les prendrait donc.

D’entrée de jeu, le directeur général des infrastructures indiqua ce qui est, semble-t-il, le fondement de l’écotaxe : non pas mettre en place une taxation écologique, mais assurer, en ces temps de pénuries budgétaires, un financement pérenne et fléché pour assurer l’entretien et le renouvellement des infrastructures de transports, en priorité routières. « Il y avait une commande politique forte pour l’écotaxe, une demande pour garantir le financement des infrastructures. J’ai la prétention de penser que la DGITM a conduit sa mission de façon exemplaire, en complète transparence », expliqua-t-il.

Son récit, par la suite, est une illustration de la façon dont fonctionne la haute administration. Tout part d’un chiffre. « Le ministre (de l’écologie) Jean-Louis Borloo voulait 1 milliard d’euros (de recettes) », dit-il. L’objectif étant fixé à l’administration de trouver les moyens de l’atteindre. D’abord, elle commença par calculer le taux plafond qui pourrait être demandé, en fonction des impératifs européens : 16 centimes par kilomètre. Trop cher ! Alors, le taux fut ramené à 12 centimes.

À partir de là, tout fut calculé : la taille des camions, qui pourraient être redevables de la taxe, les routes, qui pourraient être imposées. C’est ainsi que le camion de ramassage de lait de Bretagne a été pris dans les calculs, quand les transports de 18 tonnes passant par la Savoie en sont exclus. Une vraie préoccupation écologique, comme on le voit.

 « Mais pourquoi choisir de passer par un partenariat public-privé pour mettre en place ce dispositif ? L’État ne pouvait-il pas le mettre en place lui-même ? » demanda la rapporteuse de la commission, la sénatrice PS Virginie Klès. « C’est un projet très innovant et très complexe. Le faire réaliser par l’État aurait été très compliqué. Je ne suis pas convaincu que l’administration aurait été en état d’assurer un système aussi complexe 

via www.mediapart.fr

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