Depuis, un autre projet de loi « d’orientation et de programmation relative à la politique de développement et de solidarité internationale », examiné à l’Assemblée nationale en février et au Sénat en mai, doit être adopté avant l’été. Les discussions autour du projet furent surtout l’occasion, pour les députés et les ONG engagés dans ce combat, de tester la volonté du gouvernement d'avancer sur ce sujet. Mais sous la pression du patronat et à l’écoute de Bercy, Matignon a refusé d'introduire des mesures contraignantes concernant la responsabilité des entreprises. Au bout du compte, les sociétés sont tenues d'identifier, prévenir et atténuer les atteintes aux droits de l’homme dont elles sont responsables, et cela sans obligation…
Lasses de se faire balader, six ONG, dont le CCFD-Terre Solidaire et le Collectif "éthique sur l’étiquette", ont décidé, le 24 mars, d’adresser un questionnaire aux dirigeants de 40 entreprises du CAC 40. L’objectif était de prendre leur avis sur les principes directeurs des Nations unies relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme. Les ONG souhaitent savoir comment les entreprises les appliquent et si elles seraient favorables à un encadrement juridique.
La réaction du Medef n’a pas tardé. Dès le 4 avril, une réunion est organisée avec l’Afep (association française des entreprises privées), pour préparer un modèle de réponse type. Mediapart a pu se procurer le document issu de cette rencontre, ainsi que la plupart des réponses (certaines sont en lien hypertexte dans l'article, vous les trouverez toutes sous l'onglet prolonger).
Voici l’avertissement patronal figurant dans le mail envoyé le 7 avril aux entreprises concernées :
« Ce questionnaire ne porte en apparence que sur les principes directeurs de l’ONU relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme, il doit être lu et travaillé dans le contexte de la proposition de loi sur le "devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordre", fortement soutenue par la coalition des ONG auteures du questionnaire. Les entreprises seraient confrontées à de graves problèmes d’insécurité juridique et de compétitivité si la France adoptait une loi introduisant une présomption quasi irréfragable de responsabilité civile et pénale des sociétés mères et donneuses d’ordre, qui serait en contradiction avec les principes généraux qui gouvernent le droit français et en particulier le principe d’autonomie des personnes morales. »
Trente-quatre entreprises ont finalement répondu au questionnaire – six ont refusé de le faire parmi lesquelles Arcelor Mittal, Axa, Lafarge et Alcatel-Lucent. La grande majorité va reprendre les réponses proposées par l’Afep, jusqu’à la remarque préalable : un commentaire, repris par plusieurs entreprises, qui déplore « le caractère fermé du questionnaire et le trop peu de place laissé aux explications et illustrations susceptibles de tronquer la position des entreprises sur ce sujet »…
via www.mediapart.fr