En 2013, l’entreprise pétrolière états-unienne Chevron est condamnée à verser 9,5 milliards de dollars d’amende, par la Cour nationale de justice d’Équateur. En cause, la pollution catastrophique occasionnée par les activités de Texaco – depuis fusionnée avec Chevron – en Amazonie équatorienne, notamment le déversement de déchets de puits de pétrole dans des fosses à ciel ouvert, de 1964 à 1990 (lire notre article). Chevron, après avoir fait des pieds et des mains pour ne pas être jugée aux États-Unis, se prétend aujourd’hui victime d’une conspiration, et refuse de payer cette amende en Équateur. En parallèle de cette procédure, les victimes [1] ont décidé, en octobre 2014, de saisir la Cour pénale internationale (CPI) de La Haye pour qu’elle ouvre une enquête criminelle sur le PDG de Chevron, John Watson. Il est accusé comme d’autres dirigeants de l’entreprise d’avoir délibérément refusé de remédier aux problèmes de pollution et à leurs conséquences dévastatrices. Pour la première fois, un dirigeant d’entreprise privée est attaqué devant la Cour pénale internationale. Et pour la première fois, cette instance est saisie pour un crime de nature environnementale.
Eduardo Toledo, juriste argentin, est l’une des chevilles ouvrières de cette procédure devant la Cour pénale internationale [2].
Où en est la procédure civile initiée par les victimes contre Chevron ?
Eduardo Toledo [3] : La procédure civile, dont le but était d’obtenir réparation pour les pollutions occasionnées par Texaco, a commencé aux États-Unis en 1992, au moment de la fusion entre Chevron et Texaco. En 2001, sur insistance des avocats de Chevron, la justice des États-Unis a décidé qu’elle n’était pas compétente, et que l’affaire devait être jugée en Équateur. Les avocats de Chevron ont signé un accord, acceptant de se plier à la décision de la justice équatorienne. Avant de changer d’avis et de dire que la justice équatorienne est la plus corrompue au monde…
En 2013, l’entreprise est condamnée à une amende de 9,5 milliards de dollars par la Cour nationale de justice de l’Équateur – l’équivalent de la Cour de cassation en France. Cette décision met fin à la procédure civile, mais Chevron a refusé de s’y soumettre. Comme Chevron n’a plus aucun actif en Équateur, les avocats des victimes ont donc dû recourir à la Convention interaméricaine d’exécution des jugements. Mais comme les États-Unis ne font pas partie de cette convention, nous avons dû passer par d’autres pays américains où Chevron avait des intérêts. D’abord l’Argentine, où la Cour suprême a fini par refuser notre requête, dans un contexte politiquement difficile : Chevron avait mis dans la balance la promesse d’un milliard de dollars d’investissements dans le pays. Aujourd’hui, nous travaillons sur une procédure au Canada.
Dans le même temps, Chevron a initié aux États-Unis un procès [4] contre certains avocats des victimes équatoriennes, les accusant de conspiration et de tentative d’extorsion. L’avocat Steven Donzinger a été condamné en mars dernier, mais nous avon
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