Après Cabu et Michel Renaud, mercredi, les obsèques de Tignous, Wolinski, Elsa Cayat et Bernard Maris ont eu lieu jeudi. À Montreuil, au Père Lachaise, au cimetière du Montparnasse, une foule émue et nombreuse avait tenu à être présente.Bien avant le début de la cérémonie, ils sont déjà là, sur le parvis de mairie de Montreuil, nombreux, le coeur gros, sous le regard amusé de l’autocaricature de Tignous. Il pleut, on a sorti les parapluies et, comme si tout le monde s’était donné le mot, ils sont de toutes les couleurs, un arc-en-ciel fendant cette vilaine grisaille. Là-haut, dans la salle des fêtes, on a encore peine à croire que c’est Tignous qu’on entoure. Son cercueil a été recouvert de dessins par des copains, des proches, des inconnus venus pour un dernier salut. Sur les écrans, les dessins défilent. Ils disent l’irréligieux, l’homme de gauche, l’éditorialiste au trait féroce. Les notes de jazz d’Ibrahim Maalouf, présent, vacillent entre mélancolie et espérance.Il y a l’équipe de Charlie, ceux qui restent, chancelants mais debout, ceux de Marianne en larmes. Dans la foule, on aperçoit Jean Solé, cofondateur de Fluide glacial, Jean-François Kahn, la mine sombre, Martine Bulard, du Monde diplomatique, le regard un peu perdu.Et puis tous ces amis, ces voisins de Montreuil, où Tignous vivait depuis plus de trente ans. Comment trouver les mots, les mots justes, les mots qui apaisent, quand la tuerie signe un basculement aux conséquences si incertaines ? Une vieille femme est là, montreuilloise de toujours, ancienne ouvrière, qui ne connaissait Tignous que par ses dessins. Comme les marcheuses du dimanche 11 janvier, à Paris, elle a planté des tas de crayons de couleur dans son chignon, et aussi une rose rouge. « Comment est-ce possible ? » répète-t-elle encore. Lorsqu’il prend la parole pour ouvrir la cérémonie, le maire de Montreuil, Patrice Bessac, détache chacun de ses mots pour contenir l’émotion : « Tignous n’est pas mort parce qu’il était à la mauvaise place au mauvais moment. Il est mort parce qu’il était le dessinateur talentueux d’un hebdomadaire satirique qui pourfend les empêcheurs du bien vivre-ensemble, les liberticides, les fauteurs de guerre, les oligarques cupides et les fanatiques de tous bords. » L’édile évoque le « fils de la banlieue, amoureux de ses inélégances, de ses plaies, de ses bosses, et surtout amoureux de ses savoir-faire ». Issu d’un milieu populaire, Tignous était « un homme tendre, humble, un homme d’engagements qui n’a jamais oublié d’où il venait », rappelle son épouse, Chloé Verlhac. Elle n’a pas préparé de discours, parce que les discours impliquent des adieux auxquels elle ne peut se résoudre. Chloé parle du père de ses enfants, de l
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