Démocratie : Face aux processus de la concentration des pouvoirs, l’abstention/passivité est une caution « sociale-libérale »

Téléchargement Démocratie Face aux processus de la concentration des pouvoirs

 

Si nous n’oublions pas que les mots sont à la fois décisifs, mais aussi problématiques, parce que

les réalités qu’ils visent, enveloppent, sont toujours plus riches, complexes, nuancés que la ou

les significations possibles de ces mots, il faut bien constater que, pour "la démocratie", il en va

ainsi, puisqu’il y us et abus du terme, puisqu’il peut signifier tout et son contraire, puisqu’il

peut être un terme de tromperie, une "étiquette", comme celle d’une marque, apposée sur une

organisation sociale. Il faut toujours renvoyer aux Grecs fondateurs, parce que, ce sont des

Grecs qui ont été fondateurs de tant de mots/choses, parce qu’ils ont été fondateurs de ce que

nous continuons de mettre en œuvre (mais sur combien d’oublis ? De trahisons ?

d’incompréhensions?), qu’entre eux et nous, les siècles passées ont favorisé un double

mouvement historique de régression et de progrès. Régression ? Les Grecs, comme tous les

peuples antiques, étaient des percepteurs/projeteurs de Beauté, quand nous savons fabriquer

essentiellement des "déchets", des laideurs, passagères ou durables. Progrès ? Les femmes,

qu’ils écartaient de la vie publique/politique, ne le sont plus. Mais, pour "la démocratie",

prétention suprême de tant de pays, dont, les Etats-Unis, la France, le constat actuel est à la

régression : d’un côté, il y a des mouvements des Etats qui concentrent des pouvoirs, et qui

privent les citoyens, de participation, de connaissance, et de l’autre, l’adhésion de tant de

citoyens à des organisations et des projets politiques favorables également à de telles

concentrations, à des démocraties non-démocratiques. C’est que la construction exige toujours

un rapport de forces : il faut peser, travailler, élaborer. Or, si les forces favorables à ces

concentrations de pouvoir sont à l’oeuvre, les forces qui prétendent vouloir les contredire

dénoncent celles-ci, mais se contentent de cette première couche démocratique, le dialogue

civique, le bavardage, le commentaire. Et, avec les "réseaux sociaux", cette situation de

citoyen/spectateur/commentateur, volontiers "cynique", comme l’était Diogène, est devenue

structurelle. Combien de citoyens identifient démocratie à exercice libre de la parole ? Comme

si une dictature ne pouvait s’accommoder de ce "bavardage" sans danger pour elle ? !

L’Histoire est la somme des rapports de force : les victoires des uns, les défaites des autres, les

victoires provisoires des uns, les victoires durables des autres, les chefs d’oeuvre et les échecs,

les connaissances du réel qui s’établissent et se partagent. Et actuellement, les forces à l’oeuvre

sont ce qu’elles sont, qu’elles nous plaisent ou pas, et si des citoyens pensent que la position de

spectateur constitue une position active, c’est donc qu’ils ne savent pas différencier ce qui est

une action d’une inaction. C’est ainsi qu’une forme de passivité dans la "démocratie

représentative" nous est annoncée pour dimanche prochain : l’abstention. Mais, étant donné les

règles de la démocratie représentative française, la dite "absention" n’a aucun poids. Les

absentionnistes seront peut-être majoritaires : l’addition de leur voix fera toujours zéro. Seuls

ceux qui auront participé auront gain de cause, et, principalement, ceux qui auront le résultat

majoritaire, au soir du premier tour, puis au soir du deuxième tour. A l’inverse, pourquoi les

citoyens se mobilisent tant pour l’élection présidentielle ? C’est que dans le système français, le

Président possède des pouvoirs concentrés élevés, de type monarchique. Ils espèrent donc que

l’élu sera bon, sera "providentiel". Mais les pouvoirs collectifs partagés, où il faut des

discussions, des compromis, ne les convainquent pas. Ils veulent de l’individualisme et de la

décision rapide : ce qu’ils font dans leur propre vie.

 Mais voilà : entre leur propre vie, et ce qu’il faut faire pour prendre des décisions qui

concernent des quantités importantes de personnes, leur modèle n’est pas transposable, sauf

dans des dictatures. Il faut donc le dire clairement : alors que tant de forces veulent nous

pousser vers ces concentrations de pouvoir de type dictatorial, ce que nous avons déjà

partiellement avec l’Union Européenne, est-ce que les citoyens veulent pousser dans le même

sens ? Le réveil risque d’être douloureux un jour : parce que l’Histoire, brusquement, fait passer

de peuple en paix à un peuple en guerre. En 1939, abusés par des hommes politiques menteurs,

vendus au IIIème Reich, abusés par des journaux également stipendiés par les nazis, beaucoup

de Français ne croyaient pas à une nouvelle guerre, alors que tous les faits indiquaient au

contraire que l’Allemagne nazie se préparait chaque jour pour cela – puisqu’elle en était à

consacrer 80 % de son budget à l’armement. Est-ce qu’une guerre européenne nous menace ?

C’est plutôt une guerre civile qui est le risque le plus élevé. Certains en ont le langage : haines,

insultes, diffamations, mensonges, promesses de violence, contre des opposants, contre des

groupes sociaux. Le 20ème siècle a démontré que cette phase de langage a toujours précédé la

phase des actes et des actions, puisque cette phase de langage a préparé les consciences à, à

habituer les consciences à une atmosphère de violence. Face à ce mouvement conjugué des

Etats et de groupes politiques qui soutiennent l’autorité violente et arbitraire, la passivité de tant

de citoyens doit-elle être interprétée par : qui ne dit mot consent ? Ou par une inconscience pure

et simple des dangers ? Le passif des passifs est élevé : en 1933, bien des Allemands étaient

contre le nazisme : communistes, socialistes (les électeurs, pas les dirigeants!), anarchistes, etc,

et ils furent nombreux à voter pour d’autres forces, contre les nazis, mais certains leur

apportèrent leur voix et d’autres s’abstinrent. En faisant ce choix, ils cautionnèrent le résultat

que nous connaissons. Et en faisant cela, ils ont à la fois agi contre eux-mêmes, mais aussi

contre les autres. C’est que les effets des pouvoirs concentrés peuvent être dramatiques. Plus les

pouvoirs, politiques, économiques, sont entre les mains d’un très petit groupe de personnes,

plus les autres dépendent de leurs décisions, de leur personnalité, de leurs préférences. Le

risque d’erreurs s’élève. A l’inverse, la déconcentration des pouvoirs permet de mieux contrôler

ceux-ci et leur usage. C’est pourquoi, à l’occasion des élections départementales 2015, celles et

ceux qui souhaitent ne pas permettre cette concentration des pouvoirs doivent permettre

l’élection de candidats et de candidates qui entendent défendre, conserver, l’existence des

départements, des moyens pour une politique publique départementale. Si les assemblées

départementales ne peuvent pas "changer la vie", elles peuvent prendre des décisions

significatives, positives, qui permettent de promouvoir des progrès civiques, sociaux,

environnementaux. Mais si les citoyens valident le projet européen et étatique d’une éradication

des départements, les absentionnistes auront voter pour, en laissant faire. La passivité civique

est souvent la traduction de la passivité politique, convertie au "laisser faire" libéral.

0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x