Ces dernières années, le décès et les tentatives de suicide de jeunes, suite à des pressions psychologiques, voire physiques, fortes, sont devenus des faits publics – dès lors qu’une narration vient en acter l’existence, et permettre aussi que la parole des jeunes, victimes, soit entendue, comme celle de leurs proches. Le décès, par suicide, de Dinah, harcelée à la fois pour ses origines, sa couleur de peau, comme pour son éventuelle orientation sexuelle, démontre, hélas, que ces pressions, agressions, psychologiques, physiques, continuent.
Cette publication a pour objet de servir à un thème simple : il faut agir. Agir en aval, quand « le mal est fait », mais surtout, agir en amont, pour éviter que des gamins mettent fin à leur jour. Comme les institutions sont explicitement défaillantes, un peu, beaucoup, …, il faut que les parents, les familles, concernés, se prennent en main sans attendre que ces institutions agissent, et il faut qu’ils agissent dans la légalité. Il est inutile d’ajouter des soucis à ceux déjà existants. MAIS si ce souci du respect de la légalité est nécessaire, il est légitime d’agir. Comment ?
Si vous êtes un parent d’un(e) enfant qui est actuellement affaibli par de telles agressions, surtout verbales, voire physiques, il est absolument prioritaire de protéger votre enfant, en le sortant du cadre où il est harcelé, quitte à ce que cela soit pour un mois, deux mois, trois mois. Il vaut mieux qu’un enfant perde ce temps scolaire mais qu’il vive plutôt que de le maintenir à tout prix dans le cadre qui est dangereux. Pourquoi faire cela ? Parce que vous avez ce pouvoir, alors que vous n’avez pas celui d’empêcher que les harceleurs soient présents dans un établissement scolaire. Ensuite, il faut impérativement contrôler les moyens de contact et d’échange, notamment électroniques, dont votre enfant se sert – quitte à ce qu’il ou elle ne le veuille pas. Sa santé mentale est en jeu. Là encore, s’il faut qu’il ou elle soit privée pendant plusieurs semaines de ces outils, c’est du temps en plus pour lire des livres, faire autre chose. Ensuite, il faut mettre la pression sur l’institution scolaire, par exemple, après une rencontre où vous avez dit les choses et demander des actes, et, dans l’hypothèse où rien de sérieux n’a eu lieu, vous pouvez engager une plainte pour « mise en danger de la vie d’autrui », « non assistance à personne en danger » – et pour que cette démarche soit efficace, il faut le faire avec un conseil juridique. Si vous n’avez pas les moyens de payer immédiatement et durablement un avocat, vous pouvez obtenir une aide financière partielle ou totale avec l’aide juridictionnelle. Par contre, il faut prendre le temps de choisir un avocat, afin qu’il ou elle soit compétent(e), sérieux(se). Après il faut identifier les harceleurs, en les caractérisant précisément : qui sont les leaders, les suiveurs, les silencieux. Les premiers sont les plus dangereux, les derniers sont susceptibles de se retourner contre les premiers. Dès lors que vous les avez identifiés, et que vous les avez répartis dans des groupes distincts, il faut s’occuper de ces « meneurs ». La première chose à faire, et là encore le mieux est de le faire via un(e) avocat(e), c’est d’écrire une lettre aux parents de ces jeunes. Le choix des mots est essentiel. Il faut rester poli, être diplomate, mais il faut être précis (montrer que vous avez des preuves), et ferme. Après une telle phase : s’il y a des réponses et des réponses positives, vous pouvez étudier si vous pouvez permettre à votre enfant de retourner à l’école; s’il n’y a pas de réponses, ou des réponses négatives, il faut passer à une autre étape. Si des parents prétendent pouvoir ignorer les comportements de leur fils, de leur fille, alors qu’ils pratiquent du harcèlement, s’ils sont dans le déni, qu’ils refusent de vous répondre ou qu’ils répondent avec légèreté, il faut alors passer à une autre phase, avec une mise en cause publique. Sans donner les noms, vous pouvez rédiger et publier un tract que vous diffusez autour de l’établissement, en veillant à ne pas le faire seul(e), à ne pas répondre violemment à des provocations (il est préférable de faire cela à des heures de cours); il faut distribuer ce document aux commerçants locaux. Vous pouvez en avoir prévenu la direction de l’établissement. Cette information est susceptible de les pousser à agir. S’ils ne font rien, vous pouvez donc agir.
En quoi aura consisté votre action, avec ces différentes phases ? Pour commencer, vous avez protégé votre enfant, et ensuite, vous commencez à mettre la pression, et ce de plus en plus, contre les harceleurs : mettre la pression, c’est ce qu’ils/elles ont fait, et du coup, ils s’aperçoivent à quel point il est désagréable de subir une pression.
Vous aurez fait tout ce que vous pouviez. Après, sur un tel sujet, il faudrait des pratiques sociales novatrices, mais celles-ci ne peuvent venir que d’un pouvoir social et politique, à l’écoute des citoyens et des faits, respectueux de, et décidé à « dépenser » des sommes investies dans des programmes. Si cela n’est pas fait, vous aurez donc la satisfaction d’avoir agi, protégé votre enfant, efficacement. Si nous étions sérieux, on peut considérer que, dans les mois qui viennent, plus aucun jeune ne décèderait en raison de ces agressions, psychologiques, physiques.