Si on pouvait faire du low-cost avec les règles de fonctionnement d’une compagnie traditionnelle, cela se saurait ! (…) Il n’est donc pas possible d’aller travailler chez Transavia aux conditions d’Air France, sauf à tuer Transavia. » Le patron d’Air France-KLM, Alexandre de Juniac – passé directement de la direction du cabinet de Christine Lagarde, ministre de l’Économie de Sarkozy, à Air France en 2011 – a au moins le mérite d’être clair : le développement de la filiale à bas coût d’Air France passera par une dégradation des conditions de travail, ou ne se fera pas [1].
Transavia France [2], créée en 2007, devait au départ fonctionner comme une compagnie charter, affrétant des avions en dehors des vols réguliers pour des voyagistes par exemple. Avec la crise que traverse Air France depuis 2008, la direction a changé de stratégie et décide d’en faire une compagnie à bas coût. En économisant notamment sur le personnel.
Délocalisation des équipages, sous-traitance au sol
Les pilotes en grève depuis plus d’une semaine demandent un contrat unique pour les pilotes d’Air France et de Transavia. La direction refuse, proposant seulement de reculer le lancement de Transavia de trois mois. Les pilotes craignent aussi une délocalisation des emplois. Car Air France veut développer des bases de Transavia dans d’autres pays d’Europe, avec du personnel employé aux conditions locales. « Nous prévoyons de commencer dès le mois d’avril prochain avec trois premières bases en dehors de la France et des Pays-Bas, puis six l’année suivante. Nous ne dirons pas où, pour ne pas donner d’indication à la concurrence. Pour chacune de ces bases, nous emploierons des personnels sous contrat local, comme le prévoit la réglementation européenne », précise Alexandre de Juniac aux Échos.
Deux de ces nouvelles bases européennes pourraient se trouver au Portugal, où le salaire minium s’élève à seulement 565 euros par mois et où les cotisations patronales sont bien plus basses qu’en France. « À terme, le projet est de transférer le personnel Transavia sur d’autres bases européennes », craint Mehdi Kemoune, chef de cabine et secrétaire général adjoint de la CGT Air France. Le représentant syndical rappelle le cas d’une autre filiale d’Air France, la plateforme téléphonique de services Blue Link : « Au début, elle devait être développée uniquement en France, puis un centre a été lancé en République tchèque ». Le centre Blue Link de Prague fait aujourd’hui travailler des conseillers téléphoniques en 21 langues, dont le français. Le salaire brut mensuel moyen en République tchèque est de… 907 € euros ! Soit 2,5 fois moins qu’en France !
Moins payés pour plus d’heures de vol
La grève en cours ne concerne que les pilotes, qui représentent 7 % des effectifs du groupe (4 700 salariés sur 65 000 employés). Mais d’autres syndicats soutiennent le mouvement. Car la menace que la stratégie low-cost fait peser sur les emplois touche tous les métiers de l’entreprise. « Nous voulons que tous les personnels Transavia soient sous contrat Air France, pas seulement les pilotes, explique Mehdi Kemoune. C’est tout à fait poss
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